Drones professionnels : les assurances manquent encore pour le matériel

De nombreuses PME innovantes s’intéressent aux drones dont les applications pour la vie civile foisonnent. Mais difficile de trouver des assurances pour le matériel.  Les assureurs abordent un marché totalement nouveau.

drone

La France pourrait devenir un terrain propice au décollage du marché des drones. Grâce à la réglementation précurseur du 11 avril 2012, les opérateurs de drones professionnels ont déjà pu s’installer et ne sont plus assimilés à de l’aéromodélisme. De gros clients (SNCF, EDF, médias, entreprise de sécurité…) commencent à leur faire appel pour des missions spécifiques de prises de vues, d’inspections, contrôles,  surveillances…

Le cas des paparazzi survolant des agglomérations avec leurs appareils photos portés par des drones a d’ailleurs constitué un des éléments déclencheurs de la mise en place de ce cadre réglementaire, établi pour définir des zones de vols autorisées.

Un des points clés de cette réglementation est l’obligation pour les entreprises opératrices de drones d’être couvertes a minima – comme pour une voiture – par une assurance au tiers.

Pour répondre à cette nouvelle demande (aujourd’hui, on compte environ 600 opérateurs de drones agrées par la DGAC, la direction générale de l’aviation civile), les assureurs sont attendus. La Réunion Aérienne (Generali, MMA, Scor UK), Axa et Allianz sont actuellement les principaux acteurs du marché.

Assurances dommages attendues

Pour ces assurances de responsabilités civiles nécessaires pour couvrir le risque de dommages (chute du drone sur une voiture par exemple) matériels ou corporels causés à des tiers, on trouve habituellement des primes allant de 300 à 400 euros environ par an. Les indemnités maximum versées par l’assureur atteignent en général 1,6 million d’euros.

“Il n’y a pas encore beaucoup de concurrence des courtiers et assureurs, il s’agit de la même base de tarification à plus ou moins 50 euros près“, précise le courtier spécialisé en aéronautique SAAM du groupe Verspieren.

Pour l’instant, seuls les dommages matériels ou corporels causés par l’appareil à un tiers  sont donc couverts.

"On n’a pas encore, ou seulement au cas par cas, d’assurances dommages propres à l’appareil et sa charge utile, c’est-à-dire le capteur qui l’équipe (appareil de prise de vue, capteur de pollution, détection acoustique…). On le recherche en tant que Fédération Professionnelle des Drones Civils (FPDC). Là, les assurances manquent ou sont encore élevées. Avec le temps, les assureurs vont s’impliquer, les tarifs vont s’affiner" , explique Francis Duruflé, vice-président de la FPDC et directeur commercial d’Infotron.

“On ne trouve pas de propositions valables pour l’instant alors que le matériel embarqué peut valoir jusqu’à 60.000 euros. Les assureurs ne veulent pas l’assurer à moins de payer des primes très élevées“, souligne Jean-Pierre Vernusse, fondateur d’Agily-drones.

Il faut compter des primes représentant environ 10% de la valeur de la machine (plus les franchises). Soit quelques milliers d’euros bien souvent. Du coup, le risque de crash ou de dommage du matériel est porté seuls par les entrepreneurs.

Nouveaux risques

Du côté des assurances, le drone est un marché neuf avec de nombreux risques à appréhender. Même pour des experts aéronautiques comme ceux de La Réunion Aérienne.

« Nous partons réellement de zéro, rien de semblable n’avait été fait. Plusieurs facteurs de risques coexistent. D’abord, nous rencontrons des profils très différents, des entreprises avec des usages des drones très variés donc avec des risques spécifiques ; ensuite, la formation des télé-pilotes n’est pas encore toujours suffisante ; des risques de collisions entre drones ou avec des avions peuvent aussi apparaître ; enfin, il existe des risques d’interférences électromagnétiques, les systèmes sont susceptibles d’être brouillés intentionnellement ou non et peuvent provoquer une perte de contrôle. On pourrait aussi parler du risque juridique crée par la prise d’image à caractère privé », relève Michel Brafman, directeur technique de La Réunion Aérienne.

Sans base de données sérieuse sur les accidents et un manque de connaissances sur les drones, les assureurs ont du mal à se positionner. Mais, « normalement en fin d’année 2014, les opérateurs de drones agrées devraient envoyer un relevé d’information à la DGAC et l’on aura un premier retour d’expérience sur le nombre d’accidents par heures de vol », avance Francis Duruflé, vice-président de la FPDC.

Les assureurs pourraient alors fournir des couvertures bien dimensionnées. Mais ils deviennent également clients de ces sociétés de drones dont ils utilisent désormais les services pour évaluer des dégâts à la suite de fortes inondations.